A.D., jeune universitaire, se persuade du jour au lendemain qu’il est devenu Dieu. C’est son cheminement, et ce qu’il va décider de faire de ce tout nouveau statut qui nous est raconté dans ce court roman très efficace.
Dans ce polar inversé, ou ce long monologue de mégalomane paranoïaque, aucun personnage n’a de nom complet, ne le méritant visiblement pas.
On commence ce livre un peu hébété, submergé par une vague de misanthropie et d’arrogance vertigineuse. Outch, ça pique. Mais ça intrigue : qui peut avoir une telle haine doublée de mépris pour le genre humain, tout en s’en excluant ? Qu’est-ce qui a pu amener une telle débauche de fureur, quel traumatisme rentré, quelle humiliation suprême ?
Quelque chose de terrible assurément. On sent d’ailleurs que ça monte, qu’une révélation va être faite et qu’on est tout près de comprendre, sans que Daniel Aubrel daigne nous délivrer en nous donnant les clefs du mystère. On n’arrive pas à deviner où tout cela va nous mener, alors on attend fébrilement que tout éclate, dans ce texte plein de tensions.
Tout ce que l’on sait, c’est que l’on est à deux doigts d’entrer dans le fantastique tant la folie d’A.D. imprègne chaque phrase du récit. Le ton prophétique et emphatique de l’auteur n’y est pas pour rien, et l’on se retrouve pris dans cette malédiction qui semble passer dans les veines de tous ceux qui lisent cette histoire de taré.
Est-ce que l’on peut faire confiance au narrateur qui manie le verbe avec tant d’adresse ? Ou est-ce qu’il ne fait que nous entraîner dans sa folie, et nous contamine comme il a commencé de le faire avec ce journaliste, qui ne sait plus comment tourner son fait divers ?
Mention spéciale encore une fois pour le style de l’auteur, qui expédie les remerciements avec autant d’élégance et de finesse que le reste de son roman.