Voilà une très belle adaptation du roman éponyme de Stéphane Zweig. C’est d’abord la couverture contrastée, cet homme sans bouche et tout le mystère derrière le calme apparent – pièces d’échecs bien rangées – qui m’ont attirée. Et puis l’envie de se replonger dans un classique dont je me souvenais à peine.
L’histoire se situe à bord d’un Transatlantique sur lequel embarque Mirko Czentovic, champion mondial d’échecs. Sont aussi à bord un jeune homme terriblement mystérieux et la fille du capitaine, une Emma un peu explosive. Elle va jusqu’à défier ce champion dans l’espoir de récupérer la chambre qui lui a été attribuée. C’est là que débarque et s’impose B., secret jusque dans son prénom, qui remportera la partie tout en affirmant n’avoir touché un échiquier depuis des années. Presque aussi lointain que la dernière défaite de Mirko en fait.
Et à travers les récits enchâssés, la mise en abyme, nous découvrons, tandis que B. entreprend de raconter son histoire à Emma, un passé en Autriche, des activités de notaire et une captivité au QG de la Gestapo, dont les conditions particulières l’ont fait sombrer peu à peu dans la folie. Une démence illustrée et transmise avec brio.
La bande-dessinée devient parfois oppressante, dérangeante mais toujours aussi captivante. Après réflexion, ce huis-clos et les couleurs y sont sans doute pour quelque chose. Il y a une unité dans chaque planche et le jeu entre tons froids et tons chauds apporte des atmosphères vite absorbantes. On en sentirait presque la chaleur moite de la salle des machines, la démence de B. et les embruns. Par ailleurs, les illustrations sont très fines, les personnages expressifs et le récit nous laisse avec un ressenti un peu particulier, on s’en sentirait presque un peu changé.