Il y a des choses que nous savons savoir. D’autres que nous savons ne pas savoir. C’est-à-dire que nous savons ne pas savoir pour le moment. Mais il y a des choses que nous ne savons pas ne pas savoir. Des choses que nous ne savons pas que nous ne savons pas.
Mark Forsyth est un étymologiste britannique enclin à aborder sa discipline par le biais de l’humour. Pour la semaine de la librairie indépendante en 2014, il a écrit le court essai Unknown Unknown, Bookshops and the delight of not getting what you wanted, traduit ici pour les éditions du Sonneur par Marie-Noël Rio par Incognita incognita ou le plaisir de trouver ce qu’on ne cherchait pas.
En plus d’être un petit plaisir de lecture grâce à l’amusante érudition de son auteur (qui m’a rappelée le français Pierre Bayard, auteur notamment de l’essai Comment parler des livres que l’on a pas lus ? aux éditions de Minuit), ce texte fait l’éloge du hasard, et en particulier de celui qui entre en jeu lorsque l’on passe la porte d’une petite librairie.
Il y a des livres que l’on a lu, des livres que l’on sait n’avoir pas lus, mais plus nombreux encore sont les livres qu’on ne sait pas ne pas avoir lus, tout simplement parce que nous ignorons jusqu’à leur existence. Et c’est là que la magie des librairies entre en jeu…
Le voyage idéal dans une librairie, la visite parfaite dans une librairie, si parfaite qu’elle n’est pas de ce monde, se déroule comme suit. Je tombe sur la boutique au fond d’une rue étroite dans une ville qui m’est totalement inconnue. J’entre, et il y a seulement un livre. Juste un. Il est posé sur une table. Il a une couverture toute simple. Je ne peux même pas voir le titre. Je l’achète, et il me révèle tous les secrets de l’univers.
Bon, on ne vous promet pas d’avoir ce livre mais plein d’autres que, vous le savez, on choisit avec soin et amour pour que, si vous en preniez par hasard, vous soyez heureux de votre découverte. Vous allez dire qu’en vous parlant de ce petit livre je prêche un peu pour ma paroisse et je vous répondrai que oui, parce qu’on est là précisément pour cette magie-là (et qu’on est nous-même des grands curieux). Pour le reste, Mark Forsyth le dit bien mieux que moi ♥