Publié l’année dernière en Allemagne (et vendu à plus de 40.000 exemplaires), Guerre sortira en France le 8 Mars 2012. Guerre n’est pas un livre comme les autres, dans son fond comme dans sa forme. L’objet en lui-même est très soigné, et ressemble à s’y méprendre à un passeport.
Le postulat de Janne Teller (l’auteure de « Rien », un fantastique et bouleversant roman paru il y a quelques années aux éditions du Panama, qui lui s’est vendu à plus de 170.000 exemplaires, toujours en Allemagne) est d’interpeller directement le lecteur, en le présentant face à une situation de prime abord très inconfortable. La réflexion expérimentale pose la question suivante sur la guerre : « Et si ça nous arrivait ? »
Évidemment, cette question on a pu se la poser souvent, sans jamais y répondre, sans jamais avoir le courage d’affronter la réponse directement, de prendre conscience de toute l’envergure d’une telle situation.
J’aurais du attendre un certain temps avant de publier ma chronique, mais je suis tombé sur une critique qui m’a prodigieusement agacé. Non pas parce qu’elle diverge de la mienne, j’aurais d’ailleurs tendance à m’y intéresser davantage ; non pas par des propos justifiés, parce que le livre pourrait choquer, déranger ; la critique en question pose le livre comme quelque chose de manipulateur, dont le procédé est grossier.
Le livre est très loin de ça, il pose une réflexion qui dérange, parce qu’elle nous met face à une réalité qu’il nous est très difficile d’appréhender. Nous avons fâcheusement tendance à oublier à quel point la vie en France est bien plus facile que bon nombre de pays autour de notre planète. A quel point nous sommes privilégiés en regard de plusieurs milliards d’êtres humains, et que nous avons beaucoup à perdre.
Janne a cette intelligence de ne pas culpabiliser le lecteur de ce qu’il se passe. On ne doit refermer pas « Guerre » en se disant qu’on a été manipulé, qu’on a « simplement » de la chance de vivre en France, et pas là où la guerre sévit. On doit ouvrir les yeux, coûte que coûte, pour non seulement éviter que le pire se produise chez nous, mais pour œuvrer ensemble à l’éradication de l’horreur de la guerre. Janne est honnête, et nous pousse à nous questionner avec la plus grande sincérité face à un cas de conscience très difficile à concevoir.
Les utopies, tout comme les rêves, les fantasmes de nos quotidiens, se doivent de nous emmener plus loin, de réfléchir au modèle de société que nous voulons, pas seulement à celui que nous réfutons.
Les adolescents liront « Guerre » comme quelque chose d’extrêmement constructif, et j’invite d’ailleurs les enseignants d’histoire, de philosophie, de français, à se plonger dans ce livre pour y puiser toutes les vertus humanistes qu’il recense, et les partager avec leurs élèves. Les adultes (et pour certains les parents) que nous sommes auront du mal à affronter certains passages du livre, mais le refermeront avec l’envie de construire un monde meilleur chaque jour, pour ceux qui seront là demain…
Un bijou d’intelligence, humain, salutaire et salvateur, à mettre entre toutes les mains.
Guerre – Et si ça nous arrivait ? Janne Teller & Jean-François Martin (sortie en france
Editions des grandes personnes – 7,90 euros
(pour ne rien vous cacher, une interview de Janne Teller et de Florence Barrau (son éditrice pour les éditions des grandes personnes) est en cours de préparation, on vous tient au courant très très vite !)
6 commentaires
Moi qui avais tant aimé « Rien » (dans mon top 5) j’ai hâte d’être bousculée à nouveau par la grande auteure Janne Teller !
j’ai toujours un peu de « lâcheté » à lire ce genre d’ouvrage, mais il le faut. et puis malheureusement nous ne sommes à l’abri de rien… j’ai relu « la vague » récemment et c’est angoissant…
Jean, j’ai cherché mais pas trouvé la critique qui t’a agacé, est-elle sur le net?
Salut Gaëlle, elle se trouve là :
http://recrealivresque.free.fr/spip.php?article254
merci!
[…] – Et si ça nous arrivait ? » aux éditions des grandes personnes (que nous avions chroniqué ici, pour rappel), j’ai souhaité interviewer Janne Teller, son auteure, pour en savoir un peu […]